Ajouté le: 12 Juillet 2012 L'heure: 15:14

Le langage de Dieu (II)

« Puisque Dieu est continuellement présent, pourquoi s’inquiéter ? Nous vivons et nous nous mouvons en Lui (Ac. 17, 28). Nous sommes portés par ses bras, nous respirons Dieu, nous sommes entourés par Dieu ; nous touchons Dieu ; nous mangeons Dieu lors du sacrement de la communion. Où que l’on se tourne, où que l’on regarde, partout se trouve Dieu ; aux Cieux, sur terre, dans les abysses, dans les arbres, dans les pierres, dans ton esprit, dans ton cœur »

Joseph l’Hésychaste, « Lettres spirituelles »

Le langage de Dieu (II)

Dieu est présent à chaque instant partout autour de nous et au-dedans de nous, mais nous demeurons la plupart du temps insensibles à Sa présence, et il nous semble qu’Il se tait, qu’Il nous a abandonnés ou qu’Il est « mort », selon le mot de Nietzsche, car lorsque notre esprit demeure attaché à ce monde, nous ne pouvons voir et connaître que les choses de ce monde. Il nous semble alors que « les choses sont tout entières ce qu’elles paraissent » et que « derrière elles, il n’y a rien » (J.-P. Sartre – « La nausée »). Cependant Dieu se manifeste par Son absence même dans le cœur de l’homme qui s’est détourné de Lui, car tous nos désirs et toutes nos aspirations humaines tirent leur source d’un désir unique, commun à tous les hommes, le désir de retrouver Dieu : « L’homme est un être qui a faim. Mais il a faim de Dieu. Derrière toutes les faims de notre vie, il y a Dieu. Tout désir est, finalement, désir de lui » (Père A. Schmemann – « Pour la vie du monde »).

Tout ce que nous sommes vient de Dieu – «  Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? » (I Cor. 4, 7) –, tout ce qui existe autour de nous, vient de Dieu, « créateur du ciel et de la terre, de toutes choses visibles et invisibles » (« Le symbole de la foi »), de sorte que nous pouvons rencontrer Dieu partout et à tout moment, même dans les plus humbles aspects de notre vie privée ou professionnelle : « Tu saisis, par exemple, le mortier, tu peux trouver Dieu. Tu saisis une brique, tu peux trouver Dieu. Tu saisis ceci, tu trouveras Dieu, tu saisis cela, tu trouveras Dieu, tu saisis une autre chose, tu trouveras Dieu. Oui, en toute chose, vous pouvez trouver Dieu. Si quelqu’un n’agit pas de la sorte, si dans toutes ces choses il ne voit pas Dieu, une telle personne même à l’église sera loin de Dieu. (…) Chacun de nous, lorsqu’il voit ou fait quelque chose, de la couture, par exemple, ou de la broderie, doit savoir reconnaître la valeur spirituelle de toute chose. Il voit des fleurs ? Il a vu Dieu. Il voit un sanglier ? Eh oui, mon enfant, là encore, il a vu Dieu » (Père Païssios l’Agiorite – « L’éveil spirituel »)

Ile ne s’agit pas, bien entendu, de croire que Dieu peut être vu comme les choses de ce monde. Dieu n’est pas ceci ou cela, et Sa véritable nature dépasse infiniment nos possibilités d’entendement. Il ne peut être connu que par ses attributs manifestés et par sa présence dans l’esprit et le cœur de l’homme. En effet, l’idée même de Dieu, en tant qu’Etre infini, éternel, tout puissant, omniscient, réunissant toutes les perfections, ne pouvait provenir seulement de l’esprit de l’homme – créature mortelle, limitée, faible et imparfaite –, mais constitue, selon Descartes, la marque de Dieu inscrite dans la conscience humaine, preuve évidente et accessible à tous de son existence : « Par le nom de Dieu j’entends une substance infinie, éternelle, immuable, indépendante, toute connaissante, toute puissante, et par laquelle moi-même, et toutes les autres choses qui sont (…) ont été crées et produites. Or ces avantages sont si grands et si éminents, que plus attentivement je les considère, et moins je me persuade que l’idée que j’en ai puisse tirer son origine de moi seul. Et par conséquent il faut nécessairement conclure de tout ce que j’ai dit auparavant, que Dieu existe : car encore que l’idée de substance soit en moi, de cela même que je suis une substance, je n’aurais pas néanmoins l’idée d’une substance infinie, moi qui suis un être fini, si elle n’avait pas été mise en moi par quelque substance qui fût véritablement infinie » (Descartes – « Méditation troisième – De Dieu, qu’il existe »).

De même que, lorsque nous lisons un livre, nous n’avons pas besoin de la présence physique de son auteur pour savoir que celui-ci existe et qu’il nous parle à travers son livre, de la même façon, nous pouvons avoir la certitude absolue que Dieu est présent dans Ses œuvres partout autour de nous et au-dedans de nous, et qu’il nous parle à chaque instant à travers toutes les choses qu’Il a créées. Lorsque l’homme ne sait plus reconnaître et comprendre le langage de Dieu, le contact est coupé à la fois avec le monde et avec lui-même : il se sent un étranger sur terre et le monde lui semble muet et inhumain. C’est la situation de l’homme absurde, telle que la décrit A. Camus : « Dans un univers soudain privé d’illusions et de lumière, l’homme se sent un étranger. Ce divorce entre l’homme et sa vie, l’acteur et son décor, c’est proprement le sentiment de l’absurdité. (…) L’absurde naît de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde ». Un monde «où l’espérance n’a plus sa place » (A. Camus – « Le mythe de Sisyphe »).

L’homme absurde est semblable à un illettré qui ne sachant pas reconnaître le langage de Dieu, est incapable de comprendre le sens de la vie et de sa propre personne. Car de même que pour pouvoir lire un livre, il faut connaître la langue de son auteur, de la même manière, la foi est le moyen par lequel nous pouvons communiquer avec Dieu. Sa Parole qui a tout créé, s’adresse à nous à travers tout ce qui existe dans le monde et à l’intérieur de l’homme, de sorte que l’existence humaine est, pour celui qui a la foi, un dialogue permanent avec Dieu : «nous devons nous souvenir de Dieu plus souvent que nous respirons ». (St. Grégoire de Naziance – « Discours théologiques »).  « Car Dieu est vraiment notre prochain et nous pouvons continuellement dialoguer avec Lui. Car Dieu est dans ton regard, dans ton esprit, dans ta parole, dans ta respiration, dans ta nourriture ; où que tu regardes, Dieu est partout. (…) C’est Lui qui nous porte sur Son sein. Ainsi, crie sans cesse : « Mon Dieu, cela te plaît-il ? Mon Dieu, est-ce cela Ta volonté ? » Et sans cesse, jour et nuit tu parles à Dieu en toute simplicité, comme un fils parle à son père. Alors tu ressens l’amour du Père et sa divine providence » (Joseph l’Hésychaste – op. cit.).

Lorsque notre dialogue avec Dieu devient une fonction naturelle de notre esprit et de notre âme, nous rétablissons du même coup le dialogue avec le monde, avec nous-même et avec la vie sous toutes se formes. Car l’Esprit de Dieu est une source éternelle de vie, plus proche de nous que notre propre respiration et présent à chaque instant au-dedans nous et dans le monde environnant :

« Eternel ! tu me sondes et tu me connais,
Tu sais quand je m’assieds et je me lève,
Tu pénètres de loin ma pensée ;
Tu sais quand je marche et quand je me couche,
Et tu pénètres toutes mes voies,
Car la parole n’est pas sur ma langue,
Que déjà, ô Eternel ! tu la connais entièrement,
Tu m’entoures par derrière et par devant,
Et tu mets ta main sur moi (…)
Où irais-je loin de ton esprit ?
Et où fuirais-je loin de ta face ?
Si je monte aux cieux, tu y es ;
Si je me couche au séjour des morts, t’y voilà.
Si je prends les ailes de l’aurore
Et que j’aille habiter à l’extrémité de la mer,
Là aussi ta main me conduira,
Et ta droite me saisira »

Dieu est le Père unique de tous le hommes, et c’est précisément parce que Son Esprit demeure en nous, que nous pouvons reconnaître Sa présence et Ses œuvres partout autour de nous et en nous-mêmes :

« C’est toi qui as formé mes reins,
Qui m’a tissé dans le sein de ma mère
Je te loue de ce que je suis une créature si merveilleuse.  
Tes œuvres sont admirables
Et mon âme le reconnaît bien »

(Psaume 139, 1-14)

Dieu se manifeste en chacun de nous, et nous accompagne à chaque instant, de même que la respiration et les battements du cœur, « car en Lui nous avons la vie, le mouvement et l’être » (Actes 17, 28).

Viorel Ștefăneanu, Paris

Le langage de Dieu (II)

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