Un saint infatigable

publicat in Grands spirituels pe 10 Septembre 2010, 11:42

« Étant pénétré de l’universalité de l’Église, il [l’évêque] ne doit pas limiter ses préoccupations à ceux qui lui sont confiés directement, mais il doit d’un œil spirituel promener son regard sur toute l’Église universelle du Christ, souhaitant l’illumination de tous les peuples et leur progression dans la foi véritable. »

(Extrait du discours tenu par Saint Jean le 9 juin 1934, à Belgrade, lors de son intronisation épiscopale)

Odile Bertrand-Hardy est l’épouse du père Grégoire Bertrand-Hardy, le premier doyen de l’Église Orthodoxe Roumaine en France. Mère de cinq enfants (Emmanuel, Luc, Cécile, Nicolas et Jean – dont Cécile est partie au Seigneur), Odile a aussi neuf petits enfants (trois filles et six garçons).
Elle est passée à l’Orthodoxie en 1955, choix déterminé par la réception de certaines réponses à des questions dogmatiques. Par la suite, elle a fait des études de théologie orthodoxe à l’Institut Saint Denis de Paris.
Elle fait partie de la paroisse francophone Saint Germain et Saint Cloud de Louveciennes, dont le recteur est le père Marc-Antoine Costa de Beauregard. Les enfants de la paroisse l’appellent „mamie”, en exprimant ainsi l’amour qu’Odile fait naître spontanément dans les cœurs de ceux qui la rencontrent.
En l’an 2009 le Patriarcat de Roumanie lui a décerné, par l’intermédiaire de Sa Béatitude le Patriarche Daniel, le Diplôme d’honneur – Saint Apôtre André pour « son activité fructueuse et utile à l’Église et à la société ».

Ioana Căpităneanu

Apostolia : Comment avez-vous connu Saint Jean de Shanghai et San Francisco ?

Odile Bertrand-Hardy : Nous avions nous, ECOF, adressé des messages à plusieurs églises qui étaient restés sans réponse ; un seul évêque nous a répondu, c’est l’Archevêque Jean, qui venait en France parce qu’il s’occupa it beaucoup à Versailles des étudiants russes qui étaient seuls ici. En étant sur place il nous a rencontrés et il a senti qu’on était vraiment à la recherche d’une théologie sûre, et non pas d’une protection brillante ou autre.

Apostolia : Quels sont vos souvenirs des rencontres avec l’Archevêque Jean?

Odile Bertrand-Hardy : Dans sa présence on sentait la présence divine, c’est comme si Dieu nous prenait dans Ses bras. La première fois où il m’a bénie j’ai senti la force de sa bénédiction.

Il était complètement en dehors du temps. C’est un homme qui ne dormait jamais, il n’avait pas de lit. Il avait un fauteuil confortable, et quand il était fatigué, il s’asseyait là.

Et comme il ne dormait jamais, la nuit n’était pas pour lui un temps de repos, mais un temps où il continuait à vaquer à ses occupations courantes. Ainsi, il avait l’habitude de convoquer les gens en pleine nuit. Quand il avait décidé d’ordonner Grégoire prêtre il l’a convoqué à 3 heures du matin. A l’époque j’étais enceinte et j’ai toujours eu des grossesses qu’on attendait à l’infini. Et là, Nicolas est né avec 8 jours d’avance, le jour de l’ordination presbytérale de son père !

Quand Saint Jean a pu s’occuper de nous il habitait dans le 16ème, dans une petite maison, et nous allions souvent avec mon mari le chercher en voiture, car nous habitions le même quartier. Il descendait tout seul avec tout ce dont il avait besoin à l’église. Il était habillé très simplement. Il n’appauvrissait certainement pas l’église !

La liturgie était particulièrement longue, car pendant la proscomédie, il citait tous les noms des vivants, tous les noms des défunts, et comme chaque fois qu’il vous rencontrait il vous mettait dans ses diptyques, alors il fallait accepter qu’il y avait 2 à 3 heures de préparation. On arrivait à l’église à 9 heures du matin et on sortait de la Liturgie vers 15-16 heures. Mais on ne sentait pas le temps passer… Il avait une telle présence qu’on ne trouvait pas ça long.

On était heureux d’être sur ses diptyques, j’espère qu’on y est pour l’éternité !

Apostolia : Pouvez-vous nous esquisser un petit portrait de saint Jean ?

Odile Bertrand-Hardy : C’est un homme qui n’était que bonté. Il ne connaissait pas la méchanceté. Il était beau de sainteté. Il émergeait de lui une telle douceur, une telle paix, c’était extraordinaire. Il avait cette présence, cette douceur, on n’avait même pas envie de lui poser des questions d’ordre spirituel. Sa présence suffisait.

Il était très patient, il ne renvoyait personne. Le suivant qui voulait lui parler attendait un peu plus.

En même temps il était drôle, il avait de l’humour. Si je m’embrouillais avec les cannes il riait.

Il ne se souciait pas de son apparence physique. Il avait des savates même pas fermées. Il était vêtu d’habits pauvres, simples, mais dignes. Ses ornements étaient magnifiques.

On a beaucoup parlé de sa difficulté à parler, qui aurait été de naissance, mais je vais affirmer que c’est faux. C’est un homme qui avait subi une torture, qui n’avait pas toute sa langue, et qui ne pouvait manger que des purées. Il y a beaucoup de gens qui affirment le contraire, mais moi je l’ai vu en face de moi, et j’ai vu que dans sa bouche il n’y avait pas beaucoup de langue. Comme il avait toujours fait preuve de courage dans la défense de ses fidèles, il se peut bien qu’on lui ait fait subir des tortures.

Apostolia : Pendant sa permanence en France, connaissait-on ses dons de thaumaturge ?

Odile Bertrand-Hardy : Je sais qu’il visitait beaucoup les malades, et qu’après son passage il y avait des rideaux tirés qu’on rouvrait, parce que les gens revivaient.

Je l’ai accompagné deux fois à l’hôpital et j’ai vu avec mes propres yeux ce qui est arrivé : après son passage le gens revenaient à la vie...

Interview réalisée par Ioana Căpităneanu,
le 20 juin 2009, à Versailles

Eglise Catholique Orthodoxe de France (ECOF). Courte présentation

L’Église Catholique Orthodoxe de France ou ECOF est un diocèse autonome qui, depuis 1993, n’est plus reconnu par aucune des Églises Orthodoxes autocéphales et autonomes.

En 1937, l’Église Russe a accueilli sous son omophore un petit groupe ayant comme pasteur l’ex-évêque catholique libéral Louis-Charles (Irénée) Winnaert (1880-1937), groupe qui a été appelé l’Église Orthodoxe Occidentale. A la mort de l’évêque, l’administration de l’église a été assumée par Evgraf Kovalevsky (1905-1970). Celui-ci a travaillé pendant plusieurs années à la restauration de l’ancien rite des Gaules, qui a été connu sous le nom de Liturgie d’après Saint Germain de Paris. L’Église française s’est ensuite séparée de Moscou afin de garder le caractère occidental de la liturgie.

Après quelques années d’isolement, le groupe de Kovalevsky a été reçu au sein de l’Église Russe Hors Frontières, entre 1959 et 1966. Evgraf Kovalevsky a été consacré évêque sous le nom de Jean-Nectaire de Saint-Denis en 1964, par Saint Jean Maximovitch. Mais malheureusement, l’évêque Kovalevsky a fait de nombreux écarts canoniques, ce qui a déterminé Saint Jean de Shanghai à lui écrire à plusieurs reprises, en l’exhortant de réparer tout de suite ses erreurs.

Jean Kovalevsky est mort en 1970. En 1972 l’Église Orthodoxe Roumaine a accueilli l’Église Orthodoxe de France sous son omophore. Gilles Bertrand-Hardy a été consacré évêque sous le nom de Germain de Saint-Denis.

Mais en 1993, après un long conflit avec le Saint Synode de Église Orthodoxe Roumaine à cause des déviations canoniques, l’Église Orthodoxe Roumaine a décidé d’arrêter la communion avec l’Eglise française, qui s’est retrouvée à nouveau isolée par rapport aux autres Églises Orthodoxes. Le Patriarcat de Roumanie a fondé un diocèse dirigé par le père Grégoire Bertrand-Hardy, rassemblant les paroisses désirant rester sous l’omophore de l’Église Orthodoxe Roumaine et respectueuses des dogmes orthodoxes.

(texte adapté d’après OrthodoxWiki)