Ajouté le: 5 Novembre 2009 L'heure: 15:14

Saint Jean Chrysostome, un martyr spécial

Saint Jean Chrysostome,  un martyr spécial

Tactique du diable. Lettres d’un vétéran de la tentation à un novice – c’est le titre de l’un des volumes de l’écrivain anglais C. S. Lewis. L’auteur a eu l’idée formidable d’imaginer les leçons d’un vieux diable à un tentateur inexpérimenté, pour l’aider à compromettre la vie éternelle d’un bon chrétien. L’une des stratégies discutées consiste en ce que, pour perdre son âme, l’homme ne doit pas être converti à l’athéisme, comme le pensait de façon simpliste le jeune apprenti. Il suffit – disait le vieux démon – de lui donner l’illusion qu’il peut porter l’étiquette de chrétien, tout en se permettant de souscrire docilement aux péché généralisé de la société.

A partir du livre de C. S. Lewis, je vous propose de considérer l’exemple d’un homme dans la vie duquel il n’y a pas eu de place pour l’autosuffisance ni pour l’accoutumance à un système en cours de dégradation. Il s’agit de St Jean Chrysostome.

Il est né en 349 dans une famille noble d’Antioche en Syrie. Son père, officier dans l’armée, mourut peu de temps après sa naissance. Restée veuve, sa mère Anthuse s’est efforcée d’offrir à son fils une éducation de haute qualité. A l’âge de 18 ans, Jean termina ses études à l’école de rhétorique, continuant par la suite sa formation intellectuelle et spirituelle sous la gouverne de grands savants spirituels. Après la mort de sa mère, il se retira dans un monastère, et par la suite dans la solitude d’une grotte. Ayant appris ses vertus, l’archevêque Meletios lui demanda de renoncer à son ermitage l’ordonna comme diacre. Jean avait 31 ans. Assumant pleinement les exigences de la vie sacerdotale, il partageait son temps entre l’instruction de ceux qui se convertissaient au christianisme et ses écrits de jeunesse, parmi lesquels son inégalable Traité du Sacerdoce. 

Six ans plus tard, il fut ordonné prêtre à la cathédrale d’Antioche. C’est là qu’il commença à prêcher chaque dimanche et jour de fête, voire même chaque jour pendant le Grand Carême. On l’a appelé “Bouche d’Or” parce que ses homélies étaient pleines de vie, éveillaient des consciences endormies et donnaient du sens. Certains marchands quittaient pendant un moment leurs affaires et allaient avec joie à la Divine Liturgie, s’efforçant de ne manquer aucune parole qui sortait de la bouche de Jean; plus encore, ils prenaient des notes, et les faisaient circuler dans les marchés et autour des tables. Sa renommée parvint jusqu’à Constantinople, la capitale de l’Empire, où, à la suite de la mort du patriarche Nectaire, le trône épiscopal était vide. Dieu permit que Jean (qui n’avait que 49 ans à l’époque) soit élu pour l’occuper. Ayant acquis une place importante dans la hiérarchie ecclésiale, il ne s’accommoda pas au chaos administratif et moral qui régnait dans certains cercles ecclésiastiques. Au contraire, il n’hésita pas à ressusciter la vie désorganisée du clergé et des moines. Il interdit de sacerdoce les évêques simoniaques, il prit des mesures sévères contre ceux qui vivaient dans la débauche ou bien avaient fait du ministère sacerdotal une affaire profitable. Il restreignit au minimum le budget destiné au luxe du palais épiscopal, en aidant les pauvres et les veuves. Il fit construire des hôpitaux, des maisons de retraite et des orphelinats. Il envoya des moines instruits pour transmettre la foi en Christ en Scythie, Perse et en Phénicie. 

Cependant, la partie du clergé qui s’était habituée à vivre dans une inertie confortable et stérile, commença à être gênée par les réformes de la vie de l’Eglise. Par conséquent, les plus furieux commencèrent à chercher des occasions d’écarter l’Archevêque Jean. A la suite d’une vaste conspiration tissée d’intrigues et de calomnies, 45 évêques signèrent son exclusion du sacerdoce et son exil. Mais le peuple se révolta,  et sa destitution fut ajournée.

Les troubles réapparurent lorsque, à proximité de la cathédrale Sainte Sophie, l’on dressa une statue devant laquelle la foule devait s’incliner dans un culte en l’honneur de l’impératrice. A l’inauguration de l’image idolâtre, les bruyants spectacles organisés troublèrent la tranquillité dans l’église où le patriarche Jean célébrait la Divine Liturgie. Dans son homélie, du haut de l’ambon, il dénonça l’immoralité des fêtes qui se déroulaient à l’extérieur. Les critiques en question arrivèrent aux oreilles de l’impératrice, qui se sentit défiée. Elle rejoignit aussitôt le complot des hiérarques offensés … et, dans le cadre d’une assemblée, ils décidèrent une deuxième fois l’exil de l’Archevêque Jean.

Une description de ses souffrances, après cette dernière sentence, se trouve dans sa lettre au Pape Innocent. L’intervention du hiérarque de Rome en faveur de Jean n’eut cependant aucun effet devant l’intransigeance de Constantinople. Considéré comme incommode, le patriarche fut obligé de s’exiler, et de prendre le chemin de la Cilicie. Il s’agissait d’une route épuisante de plus de 1.000 kilomètres qu’il dut parcourir à pied, en marche forcée, accompagné d’une escorte militaire qui avait pour mission de lui rendre la vie insupportable. Soumis à des tortures inhumaines, qui abîmèrent sa santé fragile, Jean  ferma les yeux définitivement sur ce monde, en disant:  „Gloire à Dieu pour tout!”

A la suite d’une nouvelle intervention du pape, l’empereur de Constantinople regretta de s’être laissé influencer par sa femme en exilant «un homme de Dieu».  Il envoya donc devant le tribunal les évêques impliqués directement dans cette injustice, et l’impératrice se retrouva isolée. Trois décennies après la mort de Jean, ses reliques ont été rapportées en grande liesse à Constantinople. En fin de compte, sa vertu triompha et fut confirmée par l’Eglise, qui l’admit parmi ses saints.

Par-delà le résumé de cette vie exemplaire, il convient d’en tirer deux leçons : en premier lieu, Saint Jean Chrysostome était un homme comme nous, et s’il est devenu saint, c’est parce qu’il a assumé fermement les exigences de la vie en Christ. Il arrive souvent d’entendre que la sainteté serait en quelque sorte (pré)destinée exclusivement à des personnes choisies par Dieu. Ceci est une stratégie psychologique trompeuse, par laquelle le projet de perfection est exilé de l’agenda de notre vie. La sainteté n’est pas l’apanage d’une caste, mais elle est à la portée de chacun d’entre nous si nous choisissons de vivre en Christ.

En second lieu, si nous y réfléchissons, saint Jean aurait eu plus de bénéfice à s’accommoder au régime du clergé débauché. Mais il ne l’a pas fait, et, au prix de son martyre, s’est opposé au péché de son entourage. Tout comme à l’époque, aujourd’hui dans le tissu de notre société s’infiltre un cancer qui ne fait pas souffrir pour l’instant. Sous prétexte d’écarter toute inhibition, par les média nous sommes encouragés à avoir des consciences élastiques, à justifier nos péchés, à souscrire à l’immoralité qui s’écoule légèrement par les veines du monde. En prenant cette voie, nous avons toutes les chances d’arriver, petit à petit, au rétrécissement de notre conscience et à l’absence de tout repère spirituel. 

Dans ce contexte, notre vocation n’est pas de nous retirer de la société dans une une sorte d’autosuffisance, dans un (pseudo)christianisme de ghetto; il convient d’être un défi discret dans ce monde qui s’auto-anéantit inconsciemment. Comment faire? Par l’exemple personnel, par la prédication saine de l’Evangile, par l’incarnation des vertus et – last but not least – en restant fidèle aux Saints Sacrements. Et si certains vont fermer leurs cœurs devant Dieu, il est important au moins de ne pas nous laisser contaminer par le syndrome de justification des péchés tels que l’hypocrisie, la corruption ou la débauche, qui blessent tellement le monde actuel.

Par delà les frontières célestes, St. Jean Chrysostome met chacun d’entre nous devant le dilemme suivant: le confort de l’inertie dans une médiocrité spirituelle ou bien les exigences de la vie en Christ? Que choisirons-nous?

Daniel Chira

Saint Jean Chrysostome, un martyr spécial

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