Ajouté le: 13 Octobre 2015 L'heure: 15:14

Interview avec Père Marc-Antoine Costa de Beauregard

A.I. : Arrivés à la septième édition de l’Université d’été, à part les moments très agréables que nous passons avec joie, chaque année, ensemble, quel est l’intérêt, je dirais, spirituel et missionnaire, d’y participer, autant pour le clergé que pour les fidèles de nos paroisses ?

P. Marc-Antoine : Cette septième édition de l’Université d’été, c’est un peu l’occasion de réfléchir sur ce que nous faisons. L’idée vient au départ d’une Église roumaine qui propose, suggère, impose éventuellement, une formation permanente aux clercs majeurs, et le Métropolite est parti de cette idée-là, et très vite, dès la première année, ce projet de formation permanente a été ouvert à tous, à toutes les personnes, prêtres et laïques, qui sont au service de l’Église, qui y sont engagés et qui ont envie d’être plus informés, plus compétents, et de mieux servir. On ne peut pas, au vingt-et-unième siècle, être chrétien, si on n’approfondit pas le patrimoine que l’on reçoit, ce beau patrimoine de la belle Tradition orthodoxe, on ne peut pas simplement le recevoir, l’activer d’une manière formelle, sociologique, ou même sincère, mais sans un travail de …réinvention. J’espère que je ne choque personne en disant cela, mais la conception de la Tradition, dans l’Église Orthodoxe, est celle d’une réalité continuellement en état résurrectionnel. Parce qu’elle s’identifie avec la personne même du Christ, et donc c’est ce phénomène résurrectionnel continuel qui a lieu par l’action du Saint Esprit qui définit la Tradition comme transmission vivante de la vérité et de la vie du Christ. Et ça, c’est bien de le dire en théorie, mais il faut que cela se voie et que cela se fasse, et c’est précisément dans les réunions de travail comme celle que nous avons, qui ne sont pas seulement des réunions de travail, mais aussi de prière, de vie communautaire, de fraternité aussi, qu'a lieu de manière assez privilégiée ce travail de renouveau, de réinvention, de redécouverte, de redéfinition des mots, avec tout un travail de réévaluation des concepts théologiques, des idées spirituelles, de l’expérience, et en particulier, de ce qui est vécu dans les pays traditionnels comme la Roumanie et de ce qui est vécu en Europe Occidentale. Les Roumains qui vivent en France ne sont pas les mêmes Roumains que les Roumains qui vivent en Roumanie. Et cette confrontation à une même Orthodoxie, mais vécue dans des modes différents, c’est urgent, indispensable, pour que l’on puisse continuer à vivre les uns avec les autres, que ce soit toujours la même Orthodoxie, la même unité orthodoxe, même avec des accents différents ou des rythmes différents. Donc ce phénomène de réévaluation, d’ajustement et de renouvellement par le Saint Esprit, je pense qu’il représente un moment pneumatologique, d’action du Saint Esprit qui caractérise l’Église. Parce que l’Église est quand même animée par le Saint Esprit, ou elle n’est pas.

Ensuite, il y a un deuxième aspect sur lequel Monseigneur Joseph avait insisté dès le début, notamment que l’Église n’est pas simplement le lieu où l’on prie, pas seulement le lieu où l’on confesse la foi, mais l’Église est également un lieu de pensée. C'est très important, pour nous tous, pour nos contemporains, d’annoncer cela, de l’affirmer et de le montrer. De montrer que les Chrétiens pensent (et ça, c’est extraordinaire, les Chrétiens ne sont pas plus bêtes que les autres – je pense même que les Chrétiens sont même bien plus intelligents que les autres, car ils ont le Saint Esprit, ce que les autres n’ont pas) mais nous devons aussi le démontrer. Nous devons montrer l’intelligence de la foi, de la Tradition, de l’Orthodoxie, et cette intelligence actualisée dans les grandes questions contemporaines. Donc nous avons, pendant sept ans, fait cette démonstration-là, pas seulement d’une Église qui pense, mais de personnes qui, dans l’Église, pensent. Elles ne pensent pas seulement selon une rationalité purement humaine, à la façon humaniste, par exemple, mais selon une rationalité inspirée par la foi, par le Saint Esprit, inspirée par le vécu ecclésial. Je pense que nous l’avons démontré à travers les grands thèmes contemporains – la plupart des thèmes récurrents, que je ne veux pas répéter, et jusqu’à la séance de cette année, ce sont des thèmes anthropologiques. Globalement, nos sept années d’Université d’été ont été sept années d’approfondissement de l’anthropologie patristique et orthodoxe, car c’est cela qui correspond à la question de l’époque.

Il est absolument urgent et nécessaire que nous nous préparions, nous, les communautés chrétiennes orthodoxes, nous devons nous préparer à des temps extrêmement difficiles, qui ont déjà commencé à arriver. Et ce n’est pas seulement la montée de l’Islam, dont tout le monde parle, mais l’irruption d’une civilisation technologique totalement autre, athée, arianisée, en vue de la destruction totale et définitive du Christianisme, et de la forme propre que prend le Christianisme, c’est-à-dire de la vie familiale. Nous allons donc être confrontés à une déflagration sociale unique, qui n’a jamais eu lieu dans l’histoire. Jamais dans l’histoire la société humaine n’a été confrontée à la destruction d’elle-même par des forces nouvelles. Les chrétiens doivent, dans ces circonstances-là (qui sont des circonstances extrêmement difficiles pour les croyants et pour la foi) être prêts. Et on se prépare spirituellement, en premier, en ayant une vraie ascèse, un vrai repentir, mais on se prépare aussi en se formant l’esprit, en ayant une capacité de réfléchir sur les questions qui se posent, et en ayant aussi une maîtrise du discours. Les chrétiens qui ne savent pas parler, qui ne savent pas répondre et formuler leur foi, qui ne savent pas rendre compte de leur foi, sont des chrétiens qui vont être complètement handicapés devant le monde qui se présente. Et dès maintenant, puisque ces temps sont déjà venus, nous ne sommes pas très bons encore, pas assez préparés, et ceci signale ce grand besoin de - non seulement de formation permanente, pour entretenir ce que l’on a déjà, mais de préparation pour des situations nouvelles, qui touchent à l’éthique, à l’être humain, à la gestion de la communauté humaine, au respect de la personne humaine, ou de la définition même de l’humain. Qu’est-ce que l’homme, va-t-on encore pouvoir parler d’homme en mettant sur le mot « homme » la même réalité que ce concept a contenu jusqu’à présent ? Ce n’est pas sûr. Père Jean Boboc a parlé de post-humanité – c’est cela les temps qui viennent, et les chrétiens doivent absolument être prêts et en terminer avec le Christianisme du confort ; il ne restera rien de nos paroisses, de nos églises, si ne nous préparons pas spirituellement, théologiquement, bibliquement, liturgiquement, et principalement par le repentir.

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